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l’histoire. Quelle chute ! J’allais tomber dans l’art. Car l’histoire n’est qu’un art, ou tout au plus une fausse science. Qui ne sait aujourd’hui que les historiens ont précédé les archéologues, comme les astrologues ont précédé les astronomes, comme les alchimistes ont précédé les chimistes, comme les singes ont précédé les hommes ? Dieu merci ! j’en fus quitte pour la peur.

Mon troisième ouvrage, je me hâte de le dire, était sagement conçu. C’était un mémoire intitulé : De la toilette d’une dame égyptienne, dans le moyen empire, d’après une peinture inédite. Je traitai le sujet de façon à ne point m’égarer. Je n’y introduisis pas une seule idée générale. Je me gardai de ces considérations, de ces rapprochements et de ces vues dont certains de mes collègues gâtent l’exposé des plus belles découvertes. Pourquoi fallut-il qu’une œuvre si saine eût une destinée si bizarre ? Par quel jeu du sort devait-elle être pour mon esprit la cause des égarements les plus monstrueux ? Mais n’anticipons pas sur les faits et ne brouillons point les dates. Mon mémoire fut désigné pour être lu dans une séance publique des cinq académies, honneur d’autant plus précieux qu’il échoit rarement à