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pour jouer et les amusements des enfants reproduisent, la plupart du temps, les ouvrages des grandes personnes.

Voilà les enfants à l’œuvre. Les garçons font leur tâche en silence. C’est qu’ils sont déjà des paysans et que les paysans parlent peu. Il n’en est pas de même des paysannes. Nos petites filles font marcher leur langue tout en remplissant les paniers et les sacs.

Cependant le soleil qui monte réchauffe doucement la campagne. Des toits du hameau s’élèvent des fumées légères comme des haleines. Les enfants savent ce que disent ces fumées. Elles disent que la soupe aux pois cuit dans la marmite. Encore une brassée de feuilles mortes et les petits ouvriers prendront la route du village. La montée est rude. Courbés sous le sac ou penchés sur la brouette, ils ont chaud et la sueur leur monte au front. Pierre, Babet et Jeannot s’arrêtent pour souffler.

Mais la pensée de la soupe aux pois soutient leur courage. Poussant et soufflant, ils arrivent enfin. Leur mère, qui les attend sur le pas de la porte, leur crie : « Allons, les enfants, la soupe est trempée. »

Nos amis la trouveront excellente. Il n’est si bonne soupe que celle qu’on a gagnée.