Mais la petite Pauline ne se trouble point ainsi. Elle ne saurait prévoir le mauvais temps. Il fera beau : elle le veut.
Et voici que le jour de la dînette s’est levé pur et radieux. Pas un nuage dans l’air. Les deux invités sont venus. Quel bonheur ! Car c’était là pour Thérèse un autre sujet d’inquiétude. Marthe était enrhumée et l’on pouvait craindre qu’elle ne fût point guérie à temps. Quant au petit Pierre, tout le monde sait qu’il manque toujours le train. On ne peut pas lui en faire un reproche. C’est son malheur, et ce n’est point sa faute. Sa maman est d’un naturel inexact. Partout, toujours le petit Pierre arrive après les autres ;
il n’a vu le commencement de rien. Il en a pris un air de stupeur et de résignation.
Par extraordinaire, il s’est rendu exactement à l’invitation des deux sœurs. Cette fois sa maman n’a pas manqué le train, parce qu’elle s’est trompée d’heure.
Le couvert est mis. À table pour la dînette ! C’est Thérèse qui sert. Elle est pensive et sérieuse, car des instincts de ménagère s’éveillent dans son cœur. Pierre découpe galamment. Le nez dans l’assiette et les coudes par-dessus la tête, il divise avec effort une cuisse de poulet. Il n’y a pas jusqu’à ses pieds qui ne participent à son action. Mademoiselle Marthe mange avec élégance, sans grands mouvements, sans bruit, comme les dames. Pauline y fait moins de façon : elle mange comme elle peut et tant qu’elle peut.
Thérèse, tour à tour servante et convive, est contente. Contentement passe joie. Le petit chien Gyp est venu manger les restes, et Thérèse songe, en le voyant croquer les os, que les chiens n’ont point inventé toutes les délicatesses qui font des repas des hommes et des dînettes des enfants quelque chose d’exquis.