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Page:Anatole France - Histoire comique.djvu/140

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cette nuit, enfin, fût pour tout un peuple, comme pour lui-même, une nuit sinistre.

Ayant très faim, il prit une voiture à la barrière et se fit conduire à une taverne de la rue Royale. Dans la salle lumineuse et chaude, il ressentit une impression de bien-être. Après avoir fait son menu, il ouvrit un journal du soir et vit, dans le compte rendu des Chambres, que son ministre avait prononcé un discours. En parcourant ce discours, il étouffa un petit rire ; il se rappelait certaines histoires, contées au quai d’Orsay. Le ministre des Affaires étrangères était amoureux de madame de Neuilles, cocotte vieillie, haussée par la rumeur publique à l’état d’aventurière et d’espionne. Il essayait, disait-on, sur elle les discours qu’il devait prononcer devant le Parlement. Ligny, qui avait été un peu l’amant, autrefois, de madame de Neuilles, se figurait l’homme d’État en chemise récitant à son amie cette déclaration : « Non certes, je ne méconnais