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Page:Anatole France - Histoire comique.djvu/292

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cette enfant n’avait encore aucune expérience de la vie. Et M. Bondois, à qui Félicie inspirait une terreur surhumaine, s’efforçait de l’apaiser par des signes respectueux et de menus présents.

Elle était violente parce qu’elle souffrait. Les lettres qu’elle recevait de La Haye irritaient son amour et le rendaient douloureux. Elle se desséchait, en proie aux images brûlantes. Quand elle voyait trop précisément son ami absent, ses tempes bourdonnaient, son cœur battait violemment, puis une ombre lourde s’épaississait dans sa tête ; toute la sensibilité de ses nerfs, toute la chaleur de son sang, toutes les forces de son être coulaient en elle et descendaient pour s’amasser en désir dans les profondeurs de sa chair. Alors elle ne songeait plus qu’à retrouver Ligny. C’est lui seul qu’elle voulait, et elle s’étonnait elle-même du dégoût qu’elle ressentait pour tout autre que lui. Car elle n’avait pas toujours eu