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Page:Anatole France - Histoire comique.djvu/60

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C’est Ligny qui t’a reconduite, j’en suis sûr. Il t’a reconduite en fiacre. J’ai entendu la voiture s’arrêter devant ta maison.

Comme elle ne répondait pas, il reprit :

— Dis le contraire !

Elle se tut. Et il répéta d’une voix pressante et comme suppliante :

— Dis que non !…

Si elle avait voulu, d’une parole, d’un seul mot, d’un petit mouvement de la tête et des épaules, elle l’aurait rendu très doux et presque heureux. Mais elle garda un silence méchant. Les lèvres serrées, le regard lointain, elle semblait perdue dans un rêve.

Il poussa un soupir rauque :

— Imbécile que j’étais, je ne pensais pas à cela ! Je me disais que tu reviendrais chez toi, comme les autres jours, avec madame Doulce, ou toute seule… Ah ! si j’avais su que tu te ferais reconduire par cet individu !…

— Eh bien ! qu’est-ce que tu aurais fait si tu avais su ?