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Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre, 1879.djvu/125

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myosotis, il le replaça sur le meuble. Puis il s’assit et s’humecta les lèvres.

— Espérez, dit-il, espérez. J’ai cet acte et je ne l’ai pas. Il se peut que je puisse le produire comme il se peut que je ne l’aie pas à ma disposition. Mais raisonnons comme s’il m’était loisible de me le procurer. J’ai appris bien tardivement que M. Haviland (au service de qui vous êtes depuis bien des années, n’est-il pas vrai ?) recherchait ce même Samuel Ewart. Il est bien naturel que je songe à l’obliger à son tour, mon bon monsieur. Il sera bien content d’avoir des nouvelles de ce pauvre Samuel, décédé si malheureusement à Jersey.

Reuline s’arrêta pour observer son homme et voir s’il ne l’avait pas trop exaspéré. Mais Groult répondit tranquillement :

— Si vous vouliez envoyer l’acte à mon maître, il fallait vous dépêcher davantage. Il est mort à l’heure qu’il est, ou peu s’en faut.

L’homme d’affaires se fit avec sa langue une fluxion sur la joue gauche et fixa ses yeux verts sur le domestique avec tout l’empire d’une évidente perspicacité. Groult en ressentit un malaise très sensible.