Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre, 1879.djvu/26

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une fois dans votre vie, si vous pouvez. Est-il vrai que vous nous quittiez ainsi et que vous alliez si loin ?

— Oui, mademoiselle ; je dis au Val-de-Grâce un éternel adieu. Je n’y ordonnancerai plus la limonade au citron. C’est sur ma demande que je suis mis hors cadre et détaché comme stagiaire en Cochinchine. Je me suis déterminé en cette circonstance comme en toute autre, après avoir mûrement réfléchi... Vous souriez, mademoiselle ? Vous me croyez léger. Mais écoutez mes raisons : d’abord j’échappe ainsi aux portières, femmes de ménage, maîtresses d’hôtel, garçons d’hôtel, marchands d’habits et autres ennemis acharnés de mon bonheur domestique. Je ne verrai plus sourire de garçons de café. Avez-vous remarqué, mademoiselle, que les garçons de café sont uniformément surmontés d’un crâne magnifique ? C’est là une observation féconde ; mais il est inutile de vous développer les théories qu’elle me suggère. Je ne verrai plus le boulevard Saint-Michel. Je trouverai à Shanghaï des monuments ostéologiques d’après lesquels j’achèverai mon mémoire sur la dentition des races jaunes. Enfin,