Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre, 1879.djvu/49

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poche, n’avait pas cette quiétude, cette paix du cœur, cette présence assidue d’un esprit vigilant qu’il faut aux mères pour développer avec adresse et bonheur les petites âmes obscures qu’elles ont mises au monde. Hélène, embrassée ou fessée sans savoir pourquoi, renonçait à distinguer ses bonnes actions de ses mauvaises et s’engourdissait.

— Cette enfant me fera mourir ! s’écriait tout à coup madame Fellaire. Je ne sais pas ce que j’ai fait à Dieu pour qu’il m’ait donné un monstre pareil !

Puis c’étaient des vociférations, des sanglots, des poings crispés, des portes claquant avec fracas les chambranles. La pauvre petite, haletante et le cœur gros, se coulait sans bruit dans sa couchette et s’endormait avec des larmes sur les joues. Le lendemain matin, elle se réveillait sous une musique de baisers, de douces paroles, de jolies cantilènes que lui versait sa maman, toute éclaircie depuis la veille par quelques tardives attentions de M. Fellaire.

Quant à son papa, Hélène le trouvait très beau, très bon, très grand. Ses épais favoris et ses gi-