Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/85

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Dans la détente de ses nerfs, elle s’assoupit et, toute tiède et molle de sommeil, elle songea à René, qu’elle revit avec tous les charmes du rêve, avec toutes les magies d’un absent aimé ; puis ses visions devinrent confuses et pénibles. Elle avait la tête en feu, elle frissonnait, ses dents claquaient. Elle éprouva à se mettre au lit une sensation qui ressemblait à de la joie, puis elle ne sut plus ce qu’elle était devenue. Elle voyait des figures terribles qui passaient et qu’elle n’avait pas le temps de reconnaître. Où donc était-elle ? Et que lui voulait cette foule d’étrangers vêtus de toutes sortes de costumes de théâtre ? Quelque chose de chaud qu’elle écartait sans cesse avec horreur lui pesait sur la poitrine à l’étouffer. C’était un chat rouge avec des yeux qui changeaient de couleur. Elle écartait les coudes et pliait les genoux. Une religieuse venait rajuster des couvertures sur elle ; mais pourquoi cela ? Et puis, ils étaient là, deux ou trois, qui l’empêchaient de sortir. Elle avait pourtant quelque chose de bien grave à faire, quelque chose qu’on ne pouvait différer d’une minute ; mais elle ne savait plus quoi. Elle criait : « Oh ! ma tête ! ma pauvre tête ! » Elle souffrait