Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/104

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la signification même de ces choses est perdue. Je doute que les remarques que j’en fais soient bien entendues, si ce n’est, par aventure, de quelque prêtre érudit et de quelque vieux magistrat.

Ah ! si comme l’espérait le léger Consul, l’Église gallicane avait été rétablie, l’épée du Concordat aurait aujourd’hui sa pointe tournée contre Rome, un Concile National aurait condamné vingt fois, depuis quarante ans, le Pape usurpateur, le Pape coupable de promulguer de nouveaux dogmes et de proclamer sa propre infaillibilité, au mépris des canons de l’Église.

Bonaparte et ses graves collaborateurs se sont trompés au point qu’on ne reconnaît plus leurs intentions. Faire une Église gallicane en 1801 ! Mais ce général rêvait ! Quand l’Église était un ordre dans l’État, quand elle possédait le tiers du sol et quatre milliards de biens, quand elle commandait au bras séculier, elle avait les moyens d’être gallicane. Encore arriva-t-il parfois que le Gesù la mit dans sa poche. Enfin elle était l’Église de France. Mais un clergé sans argent et sans terres ne sera jamais qu’un tas d’idolâtres romains ou de pauvres diables schismatiques.

Libre et séparé de l’État, le clergé de France allait au schisme. Le Concordat l’a rendu idolâtre.