Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/40

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étaient tous rentrés. Ce fut la première persécution de l’Église sous la troisième République. Elle dura de juin à septembre.

Selon les intentions de Jules Ferry et de ses collaborateurs, elle ne fut qu’une apparence et un amusement. Jules Ferry n’avait pas formé sans doute à cette époque les plans qu’il exécuta plus tard. Mais il était déjà entêté de gouvernement et d’autorité. Il avait deux grandes parties de l’homme d’État, la puissance de travail et l’opiniâtreté. Il savait conduire une entreprise, et si son action contre les moines fut d’une faiblesse visible, c’est qu’il le voulut bien, et qu’il suivait, en ménageant l’Église, les avertissements de son ambition. Devenu, après la mort de Gambetta, chef du gouvernement, il se montra impérialiste à la manière anglaise et jeta la France dans ces expéditions coloniales et dans ces conquêtes lointaines qui emportent armée, finance, négoce, missions catholiques d’un même élan de gloire et d’affaires. Dès lors, il flatta les évêques et ne ferma plus les couvents. Les Pères Blancs devinrent ses collaborateurs. Pour lui, le péril ne venait plus des moines. Il se dressait à gauche, sur les bancs où siégeaient les radicaux. C’était le temps où Clemenceau portait des coups répétés à la politique opportuniste. Il lui fut dit plus tard : « Vous renversiez tous les ministères. » À quoi il répondit : « Je n’en ai jamais renversé qu’un : c’était toujours le même ». Il avait raison, tout particulièrement en matière ecclésiastique. La politique religieuse des opportunistes consista toujours à composer secrète-