Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/60

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avancés un chef modéré que d’imposer aux modérés un chef moins modéré qu’eux.

M. Waldeck-Rousseau, quand il se présenta devant la Chambre avec ses collègues, fut accueilli par les invectives et les hurlements des nationalistes. Et, ce qui dut lui être plus sensible, ses amis les plus proches, les républicains libéraux, lui refusèrent leur appui. Libéraux, ils entendaient défendre avec le nationalisme la liberté du privilège et de la domination : ce qui était beaucoup accorder aux principes, ou plutôt jouer sur les mots. On sait que les doctrinaires aiment assez ce jeu. La majorité républicaine, ainsi entamée, n’était pas très nombreuse, mais elle ne manqua pas au ministère Waldeck-Rousseau pendant les trois années qu’il garda le pouvoir.

L’œuvre de ce ministère fut la loi du 1er juillet 1901 sur les associations, disposant qu’aucune congrégation ne peut se former sans autorisation. Les congrégations existantes au moment de la promulgation de cette loi, qui n’auraient pas été autorisées ou reconnues, devraient demander l’autorisation. Celles qui ne l’auraient pas demandée dans les délais légaux ou à qui elle aurait été refusée seraient réputées dissoutes de plein droit. La liquidation des biens détenus par elles aurait lieu en justice. De plus, cette loi interdisait d’enseigner aux membres des congrégations religieuses non autorisées. Loi si traditionnelle et si française, qu’on en retrouve l’esprit et les termes dans toute notre vieille législation, et qu’on entend dans le passé les juristes du nouveau régime et de l’ancien