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l’étui de nacre

Aime-t-il la musique ? Mais la belle question ! Pour ne pas l’aimer, il faudrait être un barbare en proie à toutes les fureurs. Venez jeudi prochain, monsieur Aubier ; ma fille Amélie vous chantera une romance.

En parlant ainsi, madame Berthemet désigna une jeune demoiselle coiffée à la grecque et vêtue de blanc, dont les cheveux blonds et les yeux bleus me parurent les plus beaux du monde. Je rougis en la saluant. Mais elle ne parut point s’apercevoir de mon trouble.

En rentrant à l’hôtel de Puybonne, je ne dissimulai pas à M. Mille l’impression que me fit la beauté d’une si aimable personne.

— Il faut donc, me répondit M. Mille, ajouter une strophe à mon ode.

Et après quelques secondes de réflexion :

— Voilà qui est fait, ajouta-t-il.

Si d’une belle honnête et sage
Tu sais un jour te faire aimer,
Le nœud sacré du mariage
Est le seul que tu dois former ;
Mais à l’autel de la Patrie
Courez tous deux pour vous unir,
Que jamais votre foi trahie
N’ordonne au ciel de vous punir.