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l’étui de nacre

de la nature et du printemps. De toutes les forces de sa poitrine, gonflée de vie, elle aspirait la liberté.

Elle voyait, goûtait son salut par avance. Et comme il s’y mêlait une idée d’amour, elle mit ses deux mains sur son cœur pour contenir son bonheur. Mais peu à peu la réflexion, puissante chez elle, domina le sentiment. Elle fixa sur la fille du porte-clefs un regard attentif et lui dit :

— Ma belle enfant, pour quelle raison vous dévouez-vous ainsi à moi, que vous ne connaissez pas ?

— C’est, lui répondit Rose en oubliant de la tutoyer, parce que votre bon ami me donnera beaucoup d’argent quand vous serez libre, et qu’alors j’épouserai Florentin, mon amoureux. Vous voyez, citoyenne, que c’est pour moi que je travaille. Mais je suis plus contente de vous sauver que d’en sauver une autre.

— Je vous en rends grâce, mon enfant ; mais pourquoi cela ?

— Parce que vous êtes mignonne et que votre bon ami a beaucoup de chagrin loin de vous. C’est convenu, n’est-ce pas ?