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l’étui de nacre

vaux. Et elle accomplissait cet ouvrage en invoquant Jésus-Christ, principe et fin de toutes les entreprises des justes. C’est pourquoi elle acheva heureusement sa tâche clandestine le huitième jour avant celui qui avait été fixé pour la solennité du mariage. Elle demeura tout ce jour en prières ; puis, étant allée recevoir, selon sa coutume, le baiser de son père, elle rentra dans sa chambre, se coupa les cheveux, qui tombèrent à ses pieds comme des écheveaux d’or, revêtit la tunique courte, attacha les caleçons autour de ses jambes par des courroies de laine, baissa le capuchon sur ses yeux, et, la nuit étant venue, elle sortit sans bruit de la maison, tandis que tout dormait, maîtres et serviteurs. Seul, le chien veillait ; mais comme il la connaissait, il la suivit quelque temps en silence et rentra dans sa niche.

Elle traversa d’un pas rapide la ville déserte où l’on entendait seulement par intervalles les cris des matelots ivres et le pas lourd des soldats du guet qui poursuivaient des voleurs. Parce que Dieu était avec elle, elle ne reçut aucune offense des hommes. Et ayant franchi