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CHAPITRE V

LES RÉVÉRENDS PÈRES AGARIC ET CORNEMUSE


Colomban portait avec surprise et douceur le poids de la réprobation générale ; il ne pouvait sortir de chez lui sans être lapidé ; aussi ne sortait-il point ; il écrivait dans son cabinet, avec un entêtement magnifique, de nouveaux mémoires en faveur de l’encagé innocent. Cependant parmi le peu de lecteurs qu’il trouva, quelques-uns, une douzaine, furent frappés de ses raisons et commencèrent à douter de la culpabilité de Pyrot. Ils s’en ouvrirent à leurs proches, s’efforcèrent de répandre autour d’eux la lumière qui naissait dans leur esprit. L’un d’eux était un ami de Robin Mielleux à qui il confia ses perplexités et qui dès lors refusa de le recevoir. Un autre demanda, par lettre ouverte, des explications au ministre de la guerre ; un troisième publia un pamphlet terrible : celui-là, Kerdanic, était le plus redouté des polémistes. Le public en demeura stupide. On disait