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Page:Anatole France - L’Anneau d’améthyste.djvu/24

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profond de tuer, regrettèrent au dedans d’eux-mêmes de n’avoir pas de fusil.

— Vous possédez les plus belles chasses de toute la région, dit le général au duc de Brécé.

Le duc de Brécé songeait.

— C’est égal, dit-il, les juifs ne porteront pas bonheur à la France.

Le duc de Brécé, fils aîné du feu duc qui avait brillé parmi les chevau-légers à l’Assemblée de Versailles, était entré dans la vie publique après la mort du comte de Chambord. Il n’avait pas connu les jours d’espérance, les heures de lutte ardente, les entreprises monarchiques amusantes comme une conspiration, passionnées comme un acte de foi ; il n’avait pas vu le lit de tapisserie offert au prince par les dames des châteaux, les drapeaux, les bannières, les chevaux blancs qui devaient ramener le roi. Député héréditaire de Brécé, il entra au Palais-Bourbon avec des sentiments d’ini-