Page:Anatole France - L’Anneau d’améthyste.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Vêtues de noir, dans la suite ininterrompue des deuils de famille et des deuils princiers, très simples, agrestes et monastiques, ces dames causaient entre elles de mariages et de morts, de maladies et de médicaments, sous les peintures des plafonds et des lambris où apparaissaient çà et là, dans le noir opaque des toiles, la barbe grise d’un Henri IV embrassé par une Minerve tétonnière, la face pâle d’un Louis XIII opprimé par les croupes flamandes de la Victoire et de la Clémence aux tuniques envolées, la nudité rouge brique d’un vieillard, le Temps, épargnant les fleurs de lis, et encore et partout les reins à fossettes des petits génies qui soutenaient l’écu de Brécé aux trois torches d’or.

Cependant madame la duchesse douairière de Brécé tricotait des fichus de laine noire pour les orphelines. Sans cesse elle y occupait ses mains et y contentait son cœur, depuis le temps déjà lointain où elle avait