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Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/208

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paroles font frémir. Y répondrai-je par des preuves tirées des livres saints et des écrits des Pères ? Vous ferai-je entendre Dieu parlant aux patriarches et aux prophètes : Si locutus est Abraham et semini ejus in sæcula ? Déroulerai-je à vos yeux la tradition de l’Église ? Invoquerai-je contre vous l’autorité des deux Testaments ? Vous confondrai-je avec les miracles du Christ et sa parole aussi miraculeuse que ses actes ? Non ! je ne prendrai point ces saintes armes ; je craindrais trop de les profaner dans ce combat, qui n’est point solennel. L’Église nous avertit, dans sa prudence, qu’il ne faut point s’exposer à ce que l’édification se tourne en scandale. C’est pourquoi je me tairai, monsieur, sur les vérités dans lesquelles je fus nourri au pied des sanctuaires. Mais, sans faire violence à la chaste modestie de mon âme et sans exposer aux profanations les sacrés mystères, je vous montrerai Dieu s’imposant à la raison des hommes ; je vous le montrerai dans la philosophie des païens et jusque dans les propos des impies. Oui, monsieur, je vous ferai connaître que vous le confessez vous-même malgré vous, alors que vous prétendez qu’il n’existe pas. Car vous m’accorderez bien que, s’il y a dans le monde un ordre, cet ordre est