Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/301

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assorti à une si aimable personne, et résignez-vous à ce que vous ne pouvez empêcher. Cette sagesse est difficile. Elle le serait plus encore si on vous avait pris votre maîtresse. Vous sentiriez alors des dents de fer vous labourer la chair et votre esprit s’emplirait d’images odieuses et précises. Cette considération, mon fils, doit adoucir votre souffrance présente. Au reste, la vie est pleine de travaux et de douleurs. C’est ce qui nous fait concevoir une juste espérance de la béatitude éternelle.

Ainsi parlait mon bon maître, tandis que les ormes de la route royale fuyaient à nos côtés. Je me gardai de lui répondre qu’il irritait mes chagrins en voulant les adoucir et qu’il mettait, sans le savoir, le doigt sur la plaie.

Notre premier relais fut à Juvisy où nous arrivâmes le matin par la pluie. En entrant dans l’auberge de la poste, je trouvai Jahel au coin de la cheminée, où cinq ou six poulets tournaient sur trois broches. Elle se chauffait les pieds et laissait voir un peu de ses bas de soie, qui étaient pour moi un grand sujet de trouble, par l’idée de la jambe que je me représentais exactement avec le grain de la peau, le duvet et toutes sortes de circonstances frappantes. M. d’Anquetil était accoudé au dossier de