Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/224

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le second étage d’une maison du temps de Louis XV. Je fus reçu par Clorinde. Si comme il faut croire, elle « buvait », c’était une ivrognesse terriblement secrète. Je n’ai vu de ma vie vieille femme plus grave, plus tranquille, plus blanche et plus silencieuse. Dès l’entrée, l’appartement de M. Dubois révélait le curieux et le connaisseur. L’antichambre était pleine de fragments de statues et de sarcophages romains. Il y avait dans la salle à manger des marbres et de ces vases rouges ornés de figures noires, de beau style grec, qu’on appelait encore à cette époque vases étrusques. M. Dubois me montra, comme le plus riche trésor de son cabinet, un torse en marbre pentélique de jeune faune, sa nébride sur l’épaule ; il m’en vanta la grâce, la pureté, la simplicité.

— La mutilation d’une telle œuvre, me dit-il, est un des plus grands crimes de l’humanité. Mais quand une œuvre atteint ce degré de perfection, sa beauté réside tout entière en chacune de ses parties. Tandis que dans nos ouvrages modernes, si l’on ôte l’expression, c’est-à-dire la grimace, il ne reste plus rien.

Et M. Dubois parla d’abondance :

— En poésie, en art, en philosophie, il faut