Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/92

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à tout, m’offrait un paysage du Poussin.

— Il faut bifurquer, dis-je avec gravité, et choisir entre les lettres et les sciences.

La prêtresse d’Apollon secoua trois fois la tête et dit :

— Mon frère Symphorien est fort dans les sciences : il a mérité le prix de calcul et le prix de catéchisme.

Puis, s’éloignant en poussant son balai :

— Il faut que je fasse mon travail.

Je la pressai de me dire si je devais choisir les sciences.

— Pour sûr que non, mon petit maître, me répondit-elle dans toute la sincérité de son cœur, vous n’êtes pas assez intelligent.

Et elle ajouta pour ma consolation :

— L’intelligence n’est pas donnée à tout le monde. C’est un don de Dieu.

Je ne tenais pas pour absolument incroyable que je fusse aussi bête que le pensait la fille des Troglodytes, mais n’en étais pas assuré et, sur ce point, comme sur tant d’autres, je demeurais dans l’incertitude. Je ne songeais point à nourrir mon esprit et à former mon intelligence. Dans cette affaire de bifurcation, je ne cherchais que mon repos et mon agré-