Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

donné ma bénédiction paternelle. « Souviens-toi d’Empédocle », lui ai-je dit. Ah ! signor, c’est un nouvel Empédocle qu’il faudrait aujourd’hui à notre malheureuse patrie ! Voulez-vous que je vous conduise à sa statue, Excellence ? Je vous servirai de guide pour visiter les ruines. Je vous montrerai le temple de Castor et Pollux, le temple de Jupiter Olympien, le temple de Junon Lucinienne, le puits antique, le tombeau de Théron et la Porte d’or. Les guides des voyageurs sont tous des ânes, mais nous ferons des fouilles, si vous voulez, et nous découvrirons des trésors. J’ai la science, le don des fouilles, un don du ciel.

Je parvins à me dégager. Mais il courut après moi, m’arrêta au pied de l’escalier et me dit à l’oreille :

— Excellence, écoutez : je vous conduirai dans la ville ; je vous ferai connaître des Girgentines. Quelle race ! quel type ! quelles formes ! Des Siciliennes, signor, la beauté antique !

— Le diable vous emporte ! m’écriai-je indigné, et je m’enfuis dans la rue, le laissant s’agiter avec autant de noblesse que d’enthousiasme.

Quand je fus hors de sa vue, je me laissai cou-