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Page:Anatole France - Le Génie latin.djvu/119

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dans les jardins de Vaux, devant le roi. La reine, qui était grosse, ne put accompagner son époux. Mais une foule de seigneurs et de princes, Monsieur, Madame et la reine mère assistaient à cette fête. Molière raconte lui-même, dans son Avertissement, que, « d’abord que sa toille fut levée, il parut sur le théâtre en habit de ville et, s’adressant au roy avec le visage d’un homme surpris, fit des excuses sur ce qu’il se trou-voit là seul et manquoit de temps et d’acteurs pour donner à Sa Majesté le divertissement qu’elle sembloit attendre ». En même temps, du milieu de vingt jets d’eau naturels, un rocher se changea en coquille d’où sortit la Béjart en naïade. Elle fut trouvée charmante et l’on en fit des chansons.


Peut-on voir nymphe plus gentille
Qu’étoit Béjart, l’autre jour ?
Lorsqu’on vit ouvrir sa coquille,
Tout le monde disoit à l’entour,
Lorsqu’on vit ouvrir sa coquille :
Voici la mère d’amour.

Cette nymphe, cette Vénus avait, en sa vie mortelle, quarante-trois ans. Elle récita le prologue de Pellisson. Puis les Fâcheux furent rendus avec un parfait ensemble et reçurent de fréquentes marques d’approbation. Le roi fut ravi, paraît-il, de voir moqués dans cette pièce ses courtisans venus avec lui et qui applaudissaient leur naturel contrefait sans s’y reconnaître.

La Fontaine, qui assistait à ces fêtes de Vaux, écrivait cinq jours après à son ami Maucroix une lettre