Page:Anatole France - Le Jardin d’Épicure.djvu/149

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Après son départ, je feuilletai avec une émotion respectueuse le livre qu’il avait rapporté. C’était un tome de la collection Petitot, les Mémoires de La Noue, je crois. J’y trouvai un signet oublié, une étroite bande de papier sur laquelle, de sa grande écriture allongée et pointue, qui rappelait celle de madame de Sévigné, le poète avait tracé au crayon un seul mot, un nom : Bellérophon. Héros fabuleux ou navire historique, que signifiait ce nom ? Vigny songeait-il, en l’écrivant, à Napoléon trouvant les bornes des grandeurs de chair, ou bien se disait-il : « Le cavalier mélancolique porté par Pégase n’a point, quoi qu’en aient dit les Grecs, tué le monstre terrible et charmant que, la sueur au front, la gorge brûlante et les