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Page:Anatole France - Le Livre de mon ami.djvu/149

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point de péchés, point de confession. On m’avait donné, il est vrai, un petit livre qui les contenait tous. Je n’avais qu’à choisir. Mais le choix même était difficile. Il y en avait là tant et de si obscurs sur le larcin, la simonie, la prévarication, la fornication et la concupiscence ! Je trouvais dans ce petit livre : « Je m’accuse d’avoir désespéré. — Je m’accuse d’avoir entendu de mauvaises conversations. » Cela encore ne laissait pas de m’embarrasser beaucoup.

C’est pourquoi je m’en tenais d’ordinaire au chapitre des distractions. Distractions à l’office, distractions pendant les repas, distractions dans « les assemblées », j’avouais tout, et le vide déplorable de ma conscience m’inspirait une grande honte.

J’étais humilié de n’avoir pas de péchés.

Un jour, enfin, je songeai à la casquette de Fontanet ; je tenais mon péché ; j’étais sauvé !

À compter de ce jour, je me déchargeai chaque samedi, aux pieds de M. l’aumônier, du poids de la casquette de Fontanet.

Par la façon dont j’endommageais en elle le bien du prochain, cette casquette m’inspirait, chaque samedi, pendant quelques minutes, de