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Dans dix ans, nous serons tous électriciens.

M. Louis Figuier, qui pourtant est un homme de bien, sort de sa placidité ordinaire à la seule pensée que les petits garçons et les petites filles de France peuvent connaître encore Peau d’Âne. Il a composé une préface tout exprès pour dire aux parents de retirer à leurs enfants les Contes de Perrault et de les remplacer par les ouvrages du docteur Ludovicus Ficus son ami. — Fermez-moi ce livre, mademoiselle Jeanne, laissez là, s’il vous plaît, « l’Oiseau bleu, couleur du temps » que vous trouvez si aimable et qui vous fait pleurer, et étudiez vite l’éthérisation. Il serait beau qu’à sept ans vous n’eussiez pas encore une opinion faite sur la puissance anesthésique du protoxyde d’azote ! — M. Louis Figuier a découvert que les fées sont des êtres imaginaires. C’est pourquoi il ne peut souffrir qu’on parle d’elles aux enfants. Il leur parle du guano, qui n’a rien d’imaginaire. — Eh bien, docteur, les fées existent précisément parce qu’elles sont imaginaires. Elles existent dans les imaginations naïves et fraîches, naturellement ouvertes à la poésie toujours jeune des traditions populaires.