Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/125

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ses amies françaises les honneurs du logis qui reflétait les délicatesses ardentes de son goût. Aux murs du salon, des vierges siennoises, pâles, les mains longues, régnaient paisiblement au milieu des anges, des patriarches et des saints, dans les belles architectures dorées des triptyques. Sur un socle se tenait debout une Madeleine, vêtue de ses cheveux, effrayante de maigreur et de vieillesse, quelque mendiante de la route de Pistoïa, brûlée par les soleils et les neiges, qu’avait copiée dans l’argile, avec une fidélité horrible et touchante, un précurseur inconnu de Donatello. Et partout les armoiries de miss Bell : des cloches et des clochettes. Les plus grosses élevaient leur mont de bronze aux angles de la chambre ; d’autres, se touchant, formaient leur chaîne au pied des murs. De plus petites couraient tout le long des corniches. Il y en avait sur le poêle, sur les coffres et sur les bahuts. Les vitrines étaient remplies de cloches d’argent et de vermeil. Grosses cloches de bronze, marquées du lys florentin, sonnettes de la Renaissance, faites d’une dame portant un large vertugadin, sonnettes des trépassés, décorées de larmes et d’ossements, sonnettes ajourées, couvertes d’animaux symboliques et de feuillages, qui sonnaient dans les églises au temps de saint Louis, sonnettes de table du xviie siè-