Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/127

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descendit sur la terrasse où l’attendait miss Bell. L’air humide, tiédi par un soleil encore faible et déjà généreux, soufflait l’inquiète douceur du printemps. Thérèse, accoudée à la balustrade, baignait ses yeux dans la lumière. À ses pieds, les cyprès élevaient leurs quenouilles noires et les oliviers moutonnaient sur les pentes. Au creux de la vallée, Florence étendait ses dômes, ses tours et la multitude de ses toits rouges, à travers laquelle l’Arno laissait deviner à peine sa ligne ondoyante. Au delà, bleuissaient les collines.

Elle cherchait à reconnaître les jardins Boboli, où elle s’était promenée dans un premier voyage, les Cascine, qu’elle n’aimait guère, le palais Pitti, Sainte-Marie-de-la-Fleur. Puis l’infini charmant du ciel l’attira. Elle suivait dans les nuages les formes qui s’écoulent.

Après un long silence, Vivian Bell étendit la main vers l’horizon.

— Darling, je ne puis pas dire, je ne sais pas dire. Mais regardez, darling, regardez encore. Ce que vous voyez est unique au monde. Nulle part la nature n’est à ce point subtile, élégante et fine. Le dieu qui fit les collines de Florence était artiste. Oh ! il était joaillier, graveur en médailles, sculpteur, fondeur en bronze et peintre ; c’était un florentin. Il n’a