Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/20

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— Tu veux ? Écoute : je serai libre demain toute la journée. Attends moi rue Spontini à trois heures. Nous irons nous promener après.

Il la remercia d’un regard. Puis, ayant repris sa place devant elle, à l’autre côté de la cheminée, il lui demanda ce que c’était que ce Dechartre qu’elle se faisait présenter.

— Je ne me le fais pas présenter. On me le présente. C’est un sculpteur.

Il se plaignit qu’elle eût besoin de voir de nouveaux visages.

— Un sculpteur ? Ils sont généralement un peu brutes, les sculpteurs.

— Oh ! celui-là sculpte si peu ! Mais, si vous êtes contrarié que je le reçoive, je ne le recevrai pas.

— Je serais contrarié si le monde vous prenait une partie du temps que vous me donnez.

— Mon ami, vous n’avez pas à vous plaindre que je sois trop mondaine. Je ne suis pas même allée hier chez madame Meillan.

— Vous avez raison de vous y montrer le moins possible : ce n’est pas une maison pour vous.

Il s’expliqua. Toutes les femmes qui y allaient avaient eu quelque aventure qu’on savait, qu’on racontait. Au reste, madame Meillan favorisait les intrigues. Il donna quelques exemples à l’appui.