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Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/261

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nêtes fonctionnaires qui ne connaissent que les sentiments officiels.

— Oh ! darling, vous vous trompez beaucoup. Les cloches sont dans le secret des âmes ; elles savent tout. Mais je suis bien contente de vous trouver. Oh ! je sais, my love, pourquoi vous êtes venue à la gare. Votre femme de chambre vous a trahie. Elle m’a dit que vous attendiez une robe rose qui ne venait pas, et que vous en séchiez d’impatience. Mais ne vous mettez pas en peine. Vous êtes toujours la toute belle, my love.

Elle fit monter madame Martin dans la charrette.

— Venez vite, darling, M. Jacques Dechartre dîne ce soir à la maison, et je ne voudrais pas le faire attendre.

Et, tandis qu’ils allaient dans le silence du soir, par les sentiers pleins de parfums sauvages :

— Voyez-vous là-bas, darling, les noires quenouilles des Parques, les cyprès du cimetière ? C’est là que je veux dormir.

Mais Thérèse songeait, inquiète : « Ils l’ont vu. L’a-t-elle reconnu ? Je ne crois pas. La place était déjà sombre et semée de petites lumières aveuglantes. Le connaissait-elle seulement ? Je ne me rappelle pas si elle l’a vu chez moi l’année dernière. »