Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/74

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n’était pas par raison, bien sûr, ni par devoir. C’était par… caprice.

Il la regarda, surpris et attristé.

— Le mot vous fâche, mon ami ? Mettons que c’était par amour. Et vraiment c’était de bon cœur et parce que je sentais que vous m’aimiez. Mais l’amour doit être un plaisir, et si je n’y trouve pas la satisfaction de ce que vous appelez mes caprices, et de ce qui est mon désir, ma vie, mon amour même, je n’en veux plus, j’aime mieux vivre seule. Vous êtes étonnant ! Mes caprices ! Est-ce qu’il y a autre chose dans la vie ? Votre chasse au renard, ce n’est pas un caprice ?

Il répondit très sincèrement :

— Si je n’avais pas promis, je vous jure, Thérèse, que je vous sacrifierais ce petit plaisir avec bien de la joie.

Elle sentit qu’il disait vrai. Elle le savait très exact à tenir ses engagements dans les moindres affaires. Sans cesse enchaîné par sa parole, il portait dans les relations mondaines une minutieuse exactitude de conscience. Elle entrevit qu’en insistant elle obtiendrait qu’il ne partît pas. Mais il était trop tard : elle ne voulait plus gagner. Elle ne cherchait désormais que le plaisir violent de perdre. Elle fit semblant de prendre au sérieux cette raison, qu’elle trouvait assez niaise :