Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/188

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de la cellule où il jouait aux cartes avec un guichetier. De son côté, le directeur de la prison, M. Ossian Colot, officier d’Académie, faisait volontiers à messieurs les journalistes, ainsi qu’aux personnes éminentes de la ville, les honneurs de son condamné à mort. M. Ossian Colot avait traité avec compétence diverses questions pénitentiaires. Il était fier de son établissement, aménagé sur les plus nouveaux modèles, et il ne dédaignait pas la popularité. Les visiteurs jetaient sur Lecœur un regard curieux, en songeant à la nature des relations qui s’étaient établies entre ce garçon de vingt ans et la veuve nonagénaire qui devait être sa victime. Et l’on restait stupide devant cette monstrueuse brute. Cependant l’aumônier de la prison, M. l’abbé Tabarit, contait, avec des larmes, que ce pauvre enfant exprimait les sentiments les plus édifiants de contrition et de piété. Et Lecœur, du matin au soir, depuis quatre-vingt-dix jours, jouait aux