Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/214

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que les généraux de l’an II punissaient avec une inexorable sévérité. Dans l’armée du Nord, un chasseur, ayant changé son vieux chapeau contre un neuf, fut passé par les armes. Deux tambours, dont l’aîné avait dix-huit ans, furent fusillés devant le front des troupes pour avoir volé quelques menus bijoux à une vieille paysanne. C’était l’âge héroïque.

— Ce n’est pas seulement les maraudeurs, reprit M. Bergeret, qu’on fusillait chaque jour dans les armées de la République. C’est aussi les mutins. Et ces soldats, tant glorifiés depuis, étaient menés comme des forçats, à cela près qu’on leur donnait rarement à manger. Il est vrai qu’ils étaient parfois d’humeur difficile. Témoin les trois cents canonniers de la 33e demi-brigade qui, l’an IV, à Mantoue, réclamèrent leur solde en braquant leurs pièces sur leurs généraux.

» Voilà des gaillards avec lesquels il ne fallait pas plaisanter ! Ils eussent été capa-