Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/90

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« Elle a été rosse. Mais j’avais été mufle. Je le sens à présent. Je connais trop tard l’impertinence de mon sourire qui lui disait : « Vous êtes un plaisir public. » Cette délicieuse créature n’est pas un philosophe affranchi des préjugés vulgaires. Elle ne pouvait me comprendre ; elle ne pouvait savoir que je tiens sa beauté pour une des plus grandes vertus du monde et l’usage qu’elle en fait pour une magistrature très auguste. J’ai manqué de tact. Et j’en ai honte. J’ai, comme tous les honnêtes gens, transgressé quelques-unes des lois humaines ; et je n’en ai point de repentir. Mais certaines actions de ma vie, qui se sont trouvées contraires à ces délicatesses imperceptibles et supérieures, qu’on nomme les convenances, m’ont laissé des regrets cuisants et une sorte de remords. En ce moment, j’ai envie de me cacher, par vergogne. Je fuirai désormais l’approche agréable de cette dame à la taille flexible,