Page:Anatole France - Le Parti noir.djvu/22

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il est obligatoire : et la force ainsi employée n’est plus une puissance brutale ; elle devient énergie bienfaisante et sainte.

L’art suprême du gouvernement est de savoir l’heure exacte où la tolérance devient de la complicité. Malheur à ceux qui masquent leur faiblesse criminelle derrière une insuffisante légalité, à ceux qui laissent le glaive s’émousser, à ceux dont la bonté tourne en débonnaireté ! Le pays livré à toutes les angoisses les rejettera flétris, pour n’avoir pas su vouloir — même au prix du sang — le défendre et le sauver.

… Aussi, messieurs, la France conserve et soigne son armée comme son trésor sacré ; elle en a le culte, et sa colère serait terrible, ses représailles sanglantes contre les sacrilèges qui oseraient l’attaquer. Malgré l’intellectualisme qui fait profession de dédaigner la force, malgré les excès d’une liberté folle qui s’impatiente et se révolte contre la force, malgré les prétentions du civilisme, si j’ose employer ce mot barbare, qui veut se subordonner le militaire, malgré le cosmopolitisme qui méconnaît les lois de l’humanité que la Providence et la nature même des choses a voulu grouper en nations distinctes, malgré tous les sophismes, les aberrations d’esprits mal équilibrés, malgré les sacrifices que toute armée nationale impose, la France veut son armée, elle la veut forte, invincible et met en elle ses plus chères, ses plus hautes espérances…