Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/129

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tour à l’église, se réjouit tout au contraire de voir le maître au lieu de l’apprenti.

Elle lui fit de grandes recommandations et l’exhorta, durant un bon quart d’heure, à peindre des figures chastes, nobles et expressives, avant de s’apercevoir qu’elle parlait à une cruche.

Sa méprise eut duré plus longtemps encore, si, impatientée de ne point recevoir de réponse, elle n’eût d’en bas tiré le maître par son manteau et culbuté de la sorte cruche, escabeau, chaperon et pinceau. Elle se mit d’abord fort en colère. Puis, comme elle ne manquait pas d’intelligence, elle comprit qu’on avait voulu lui faire entendre qu’il ne faut pas juger l’artiste à l’habit. Elle envoya son intendant chercher Buffalmacco, et le pria d’achever lui-même l’ouvrage commencé.

Il s’en tira très habilement. Les connaisseurs admiraient particulièrement dans ces fresques Jésus en croix, les trois Maries pleurant, Judas pendu à un arbre et un homme qui se mouche. Par malheur, ces peintures ont été détruites avec l’église du couvent des dames de Faenza.