Aller au contenu

Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/309

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que la curie romaine reconnaisse la constitution civile du clergé français et qu’elle brise de ses mains l’Inquisition, qui blesse l’humanité et usurpe sur le droit des États.

Le vieillard sourit :

— Mio caro figliuolo Napoleone, le pape sait qu’il faut donner et recevoir. Il cède à propos. Il vous attend. Il est durable et pacifique.

Bonaparte demeura songeur, comme si des idées nouvelles venaient se ranger dans sa tête puissante. Puis tout à coup :

— Vous ne connaissez pas l’esprit du siècle. On est fort irréligieux on France. L’impiété y est enracinée. Vous ignorez le progrès des idées de Montesquieu, de Raynal et de Rousseau. Le culte est aboli. On a perdu le respect. Vous l’avez bien vu aux propos scandaleux tenus par mes officiers à votre table.

Le bon chanoine secoua la tête :

— Oh ! ces aimables jeunes gens, ils sont légers, dissipés, étourdis ! Cela leur passera. Dans dix ans, ils courront moins les filles et ils iront à la messe. Le carnaval est de peu de jours, et celui même de votre Révolution française ne durera pas longtemps. L’Église est éternelle.