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Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/72

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mourir sont deux frères jumeaux et que tout est joie aux dieux immortels. J’ai dit. »

La voix se tut comme le murmure des feuilles quand cesse le vent. L’ombre claire s’effaça aux lueurs de l’aube qui blanchissait les collines ; les tombeaux de San Giovanni redevinrent muets et pâles dans l’air matinal. Et messer Guido songea :

— La vérité que je pressentais m’est apparue. N’est-il pas écrit au livre dont se servent les prêtres : « Les morts ne te loueront point, Seigneur ? » Les morts n’ont point de connaissance, et le divin Épicure fut sage d’affranchir les vivants des vaines terreurs de la vie future.

Une troupe de cavaliers qui passait sur la place rompit brusquement la paix de ses méditations. C’était Messer Betto Bruneleschi et sa compagnie qui s’en allaient chasser les grues dans le ruisseau de Peretola.

— Hé ! dit l’un d’eux, qui avait nom Bocca, voici Messer Guido le philosophe, qui nous méprise pour notre honnêteté, notre gentillesse et notre joyeuse vie. Il a l’air transi.

— Ce n’est pas sans raison, répliqua Messer Dore, qui passait pour facétieux. Sa dame la