Page:Anatole France - Les Contes de Jacques Tournebroche.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

peine à vivre. Marguerite n’y réussissait que par hasard, car elle n’était plus belle et n’aimait guère à faire de la dentelle. Ils s’aidaient l’un l’autre. On le disait, pour les en blâmer ; on aurait eu meilleure grâce à le dire à leur louange. Florent Guillaume était savant. Connaissant par le menu l’histoire de la belle Dame noire du Puy et l’ordre des cérémonies du grand pardon, il avait imaginé de servir de guide aux pèlerins, pensant qu’il s’en trouverait quelqu’un assez pitoyable pour lui donner de quoi souper en reconnaissance de ses belles histoires. Mais les premiers auxquels il avait offert ses services l’avaient repoussé parce que son habit percé ne décelait ni sens ni clergie, et il était revenu, dolent et rebuté, au mur de l’évêché, où il y avait un peu de soleil et son amie Marguerite.

— Ils estiment, dit-il amèrement, que je ne suis pas assez savant pour leur nombrer les reliques et conter les miracles de Notre-Dame. Croient-ils donc que mon esprit s’en est allé par les trous de mon gippon ?

― Ce n’est pas l’esprit, répondit Marguerite,