Page:Anatole France - Les Contes de Jacques Tournebroche.djvu/68

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Ils marchèrent ainsi tous trois par les rues où des hommes et des femmes, au retour du sermon, allumaient des feux devant leurs maisons pour y jeter des atours de tête et des racines de mandragore. Mais parvenu au bord de la rivière, frère Joconde s’assit sous un orme, et Guillaumette Dyonis s’approcha de lui et dit :

— Mon père, j’ai appris par révélation que vous êtes venu en ce royaume pour y rétablir la concorde et la paix. J’ai eu moi-même beaucoup de révélations touchant la paix du royaume.

Simone la Bardine parla à son tour, et dit :

— Frère Joconde, j’habitais un hôtel rue Saint-Antoine, près de la place Baudet, qui est le plus beau quartier de Paris et le plus riche. J’avais une chambre nattée, des huques de drap d’or et des robes garnies de menu vair plein trois grands coffres ; j’avais un lit de plumes, un dressoir chargé de vaisselle d’étain et un petit livre où l’on voyait en images l’histoire de Notre-Seigneur. Mais depuis les guerres et les pillages qui désolent