Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/114

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casse le nez inglorieusement. Vous avez raisonné à la manière d’un apothicaire méditatif, qui croit connaître la nature parce qu’il en flaire quelques apparences. Et vous avez jugé que la génération naturelle, qui produit des monstres, n’est pas dans le secret de Dieu qui crée des hommes pour célébrer sa gloire : Pulcher hymnus Dei homo immortalis. Vous étiez bien généreux de ne point parler aussi des nouveau-nés qui meurent sitôt le jour, des fous, des imbéciles et de toutes personnes qui ne vous semblent point, selon l’expression de Lactance, un bel hymne de Dieu, pulcher hymnus Dei. Mais qu’en savez-vous et qu’en savons-nous, monsieur Nicolas Cerise ? Vous me prenez pour un de vos lecteurs d’Amsterdam ou de la Haye, de vouloir me faire entendre que l’inintelligible nature est une objection à notre très sainte foi chrétienne. La nature, monsieur, n’est à nos yeux qu’une suite d’images incohérentes auxquelles il nous est impossible de trouver une signification, et