Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/138

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dépende du prince et de ses ministres, et que c’est accorder trop de vertu, aux lois que d’en faire les sources de la prospérité ou de la misère publiques. Néanmoins la multitude des lois est funeste, et je crains encore que les états généraux n’abusent de leur faculté législatrice.

» C’est le péché mignon de Colin et de Jeannot de faire des ordonnances en gardant leurs moutons et de dire : « Si j’étais roi !… » Quand Jeannot sera roi, il promulguera plus d’édits en un an que n’en colligea dans tout son règne l’empereur Justinien. C’est par cet endroit encore que le règne de Jeannot me semble redoutable. Mais celui des rois et des empereurs fut généralement si mauvais qu’on n’en peut craindre un pire, et Jeannot ne fera pas beaucoup plus de sottises, sans doute, ni de méchancetés que tous ces princes ceints de la double ou triple couronne qui depuis le déluge couvrent le monde de sang et de mines. Son incapacité même et sa tur-