Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/95

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M. Jérôme Coignard se coula jusquà lui pour attraper par-dessus ses épaules les nouvelles dont il était friand. Ce savant homme et d’un si beau génie, ne possédait aucune part des biens de ce monde et quand il avait bu une chopine au Petit-Bacchus, il ne lui restait pas un sou dans sa poche pour acheter les feuilles publiques. Ayant lu sur le dos de M. Blaizot la déposition de la dame de la Morangère, il s’écria que cela était bien, et qu’il lui plaisait de voir l’iniquité crouler du haut de sa tour sous la faible main d’une femme, comme il en est des exemples merveilleux rapportés dans l’Écriture.

— Cette dame, ajouta-t-il, bien qu’alliée à des publicains que je n’aime point, est semblable à ces femmes fortes, si vantées au livre des Rois. Elle plaît par un rare mélange de droiture et de finesse et j’applaudis à sa piquante victoire.

M. Roman l’interrompit :

— Prenez garde, monsieur l’abbé, dit-il en étendant le bras, prenez garde que vous