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LES DIEUX ONT SOIF

l’Horrible Conspiration de Robespierre, l’Arrestation de Robespierre, la Mort de Robespierre.

Ce jour-là, après le dîner de midi, Philippe Desmahis entra, son carton sous le bras, à l’Amour Peintre et apporta au citoyen Jean Blaise une planche qu’il venait de graver au pointillé, le Suicide de Robespierre. Le burin picaresque du graveur avait fait Robespierre aussi hideux que possible. Le peuple français n’était pas encore saoul de tous ces monuments qui consacraient l’opprobre et l’horreur de cet homme chargé de tous les crimes de la Révolution. Pourtant le marchand d’estampes, qui connaissait le public, avertit Desmahis qu’il lui donnerait désormais à graver des sujets militaires.

— Il va nous falloir des victoires et conquêtes, des sabres, des panaches, des généraux. Nous sommes partis pour la gloire. Je sens cela en moi ; mon cœur bat au récit des exploits de nos vaillantes armées. Et quand j’éprouve un sentiment, il est rare que tout le monde ne l’éprouve pas en même temps. Ce qu’il nous faut, ce sont des guerriers et des femmes, Mars et Vénus.

— Citoyen Blaise, j’ai encore chez moi deux ou trois dessins de Gamelin, que vous m’avez donnés à graver. Est-ce pressé ?

— Nullement.