Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/255

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moi une douleur de voir périr la plus humble pierre d’un vieux monument. Si même c’est un pauvre maçon très rude et malhabile qui l’a dégrossie, cette pierre fut achevée par le plus puissant des sculpteurs, le temps. Il n’a ni ciseau, ni maillet : il a pour outils la pluie, le clair de lune et le vent du nord. Il termine merveilleusement le travail des praticiens. Ce qu’il ajoute ne se peut définir et vaut infiniment.

Didron, qui aima les vieilles pierres, inscrivit peu de temps avant sa mort, sur l’album d’un ami, ce précepte sage et méprisé : « En fait de monuments anciens, il vaut mieux consolider que réparer, mieux réparer que restaurer, mieux restaurer qu’embellir ; en aucun cas, il ne faut ajouter ni retrancher. »

Cela est bien dit. Et si les architectes se bornaient à consolider les vieux monuments et ne les refaisaient pas, ils mériteraient la reconnaissance de tous les esprits respectueux des souvenirs du passé et des monuments de l’histoire.