Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/275

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trées à quelques auteurs qui ont rapporté cette histoire. Mais le chanoine Willete fait observer qu’elles sont naturelles chez un idolâtre. Ainsi, dit-il, les filles de Madian et de Moab, par le détestable conseil du faux prophète Balaam, furent envoyées aux enfants d’Israël pour les pervertir et les faire tomber dans l’idolâtrie ; ainsi les filles d’Ammon troublèrent le cœur du roi Salomon jusqu’à lui faire adorer les dieux de leur race.

Donc, la princesse Ismérie se montra aux trois fils de Mme  d’Eppes. Ils furent éblouis à sa vue. Elle parla. Sa bouche était plus redoutable que ses discours. Ils admiraient une si belle personne ; ils la redoutaient bien plus qu’ils n’avaient redouté le vizir et les docteurs, et, pour qu’elle ne changeât point leurs cœurs, ils résolurent de changer le sien.

« Enseignons-lui la vérité, qu’elle est digne d’entendre, dit le chevalier d’Eppes à ses frères. Bien que moins habile à discourir qu’à manier la lance, nous trouverons peut-être des raisons convenables, avec l’aide de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui a dit à ses apôtres : « Si vous avez à rendre témoignage de moi, ne vous préoccupez point de ce que vous aurez à dire. Je