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236 LEUCONOÉ

Le triple bandeau blanc, cher à l’épouse austère, N’enclôt pas ses cheveux blonds et de perles ceints ; Et le tissu de Cos d’une ombre de mystère La baigne, et se soulève, agité par ses seins.

Le retour des Saisons, les Heures enlacées, Tandis qu’elle riait, accoudée aux festins, Ont mûri sous son front les profondes pensées Et le doux souvenir des jours déjà lointains.

Elle songe et revoit l’enfant maigre et sauvage Qu’autrefois elle fut, brune fleur du rocher, Violette de Zanthe éclose au cher rivage, Qu’un marchand carien vint un jour arracher.

Elle revoit ses pleurs et l’injuste galère, Et le riche bétail couché, les bras liés, Puis le marché latin, le lit du Consulaire, L’ivresse, les parfums, le rire et les colliers ;

Les roses sur son seuil, les vœux des jeunes hommes, Sur la couche de fleurs Téléphus aux beaux flancs, Et l’héritage intact des vieillards économes Coulant, fondu pour elle, en flots étincelants ;