Page:Anatole France - Rabelais, Calmann-Lévy, 1928.djvu/127

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eut, dans cette ville de Lyon, d’une mère qui nous est inconnue, un enfant, un fils qui reçut sur les fonts du baptême le nom de Théodule, et l’on est porté à croire que ce fut le père qui lui donna ce nom, qui veut dire adorateur de Dieu. Rabelais ne manquait pas une occasion de montrer son amour du Dieu tout-puissant. Il l’aimait en philosophe, pour l’amour de Platon, et contre ses prêtres. Loin de cacher cet enfant comme une honte, François le laissait voir à tout venant et le petit Théodule fut bercé dans la pourpre sur les genoux des cardinaux. Les princes de l’Église ne pouvaient se montrer sévères pour un moine qui, après tout, n’accordait pas plus qu’eux aux sollicitations de la chair. Le cardinal Jean du Bellay, pour ne nommer que lui, vivait dans une sorte d’union conjugale avec la sœur, deux fois veuve, de ce cardinal de Tournon, que nous venons de voir si fort irrité contre Maître François. Théodule, à qui souriaient les princes de l’Église, Théodule mourut âgé de deux ans. Un ami de Rabelais, Boyssonné, juriste et poète, consacra à cet enfant, sorti si jeune de la vie, toute une flore latine d’élégies, de distiques, d’hendécasyllabes, de vers iambiques. Voici la traduction de ces petits poèmes imités, pour la forme, de l’Anthologie grecque, mais tout empreints de pensée chrétienne. Je me sers de la version de M. Arthur Heulhard, légèrement modifiée par endroits.